LaBD de la semaine·Littérature française·Roman graphique/BD

Des vivants

En ce 8 mai 2024, le thème des bulles de la semaine était tout trouvé : la seconde guerre mondiale. J’ai choisi de lire un roman graphique de Raphaël Meltz, Louise Moaty et de Simon Roussin sur un des premiers groupes de résistance française, celui du Musée de l’homme. « Des vivants » relate son histoire de sa création au lendemain de la signature de l’armistice par le Maréchal Pétain en 1940 jusqu’à son démantèlement, en 1942, par l’occupant.

Le réseau de résistance du Musée de l’Homme a été le premier à se structurer et à avoir des ramifications un peu partout en France. Les auteurs nous font suivre le parcours de ses membres, les moyens mis en œuvre pour résister et ne pas plier.

On voit les chercheurs et les employés du Musée partir au front pour la drôle de guerre, puis certains revenir pour entrer dans la clandestinité. Le réseau est fait d’hommes et de femmes de toutes conditions sociales, de toutes confessions, de toutes opinions politiques, refusant de baisser les bras et d’accepter l’inacceptable. Ils seront à l’origine d’actions concrètes telles que la rédaction et la publication d’un journal clandestin, l’évasion de soldats anglais ou de prisonniers souhaitant rejoindre l’Angleterre et de Gaulle. Ils s’appelaient Germaine Tillon, Boris Vildé, Yvonne Odon, Anatole Lewitsky, ils croyaient en leurs idées, à l’image d’une France refusant la fatalité ; ils croyaient au bien-fondé de leur combat, ils croyaient au savoir et à son universalité, ils croyaient en l’humanité, en l’intelligence, ils croyaient à la culture dans sa riche pluralité.

Les auteurs offrent le récit d’une période historique tragique et porteuse d’intenses émotions dans une démarche historique rigoureuse. Tout ce qui est relaté, écrit, est véridique : ce sont les mots prononcés par les membres du réseau, rien n’est inventé ou enjolivé, c’est ce qui fait la force du roman, un roman d’une grande sincérité. Ils donnent la parole à des personnes héroïques, oublieux d’eux-mêmes au nom de la liberté.

« Des vivants » est aussi un bel objet-livre : il a un dos toilé, un grammage parfait et les planches sont d’une beauté incroyable. Chaque personnage a son identité graphique, la palette de couleurs choisies (vert, violet et orange) donne une profondeur au récit et lui apporte une très forte dimension dramatique. Les planches relatant la détention des membres arrêtés sont poignantes et belles.

Ce fut une lecture forte, poignante que je n’oublierai pas de sitôt : la compagnie de ces héros, qui ignoraient leur courage jusqu’à l’Occupation allemande, était édifiante sans que les auteurs ne se posent en donneurs de leçons : les faits, bruts, durs et sans filtre parlent d’eux-mêmes et laissent le lecteur se faire son idée.

Quelques avis :

Babelio

Lu dans le cadre

#Un mois au Japon·Chat m'plaît·chatperlipopette's chat-lon·La cuisine de Chatperlipopette

Pâtes aux algues nori

J’ai préparé la semaine dernière des pâtes aux algues nori. J’ai trouvé une recette sur internet, chez Genkicooking, recette que j’ai suivie. Comme je suis végétalienne, j’ai utilisé du bouillon de légumes à la place du dashi.

Les ingrédients

200g de spaghettis (je les consomme complets)

2 feuilles de Nori

1 belle gousse d’ail

Huile d’olive

Eau de cuisson des pâtes (1 louche)

1/2 càc de bouillon de légumes en poudre

1 càc de sauce soja

1 càc de saké de cuisine

Déroulement de la recette

Cuire les spaghettis « al dente », réserver un peu d’eau de cuisson.

Couper les Nori en morceaux.

Chauffer l’huile dans une poêle et ajouter l’ail.

Quand l’huile est bien parfumée à l’ail, ajouter l’eau de cuisson réservée, le mélange de bouillon/sauce soja/saké puis les morceaux de Nori. Continuer à cuire à feu moyen.

Quand le jus a diminué de moitié, ajouter les pâtes.

Il n’y a plus qu’à dresser et déguster.

Réalisée dans le cadre

Les classiques c'est fantastique·Littérature classique·Littérature française·Théâtre

Antigone

Antigone est une des figures éternelles de la révolte, aussi ai-je eu grand plaisir à relire la pièce de Jean Anouilh pour la dernière de la Saison 4 des Classiques, c’est fantastique.

L’écrivain a écrit cette pièce en un acte pendant l’Occupation dans une irrépressible envie de faire écho à la tragédie vécue à ce moment-là. « L’Antigone » de Sophocle, lue et relue, et que je connaissais par cœur depuis toujours, a été un choc soudain pour moi pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges. Je l’ai réécrite à ma façon, avec la résonnance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre. »

Antigone, fille d’Oedipe et de Jocaste, se dresse contre l’édit de Créon, frère de Jocaste et actuel roi de Thèbes, qui prive sépulture la dépouille de Polynice, le voyou et le traître, après son duel avec son frère Etéocle. Elle est prise en flagrant délit pat la garde et est condamnée, après un long débat avec son oncle sur les fondements de l’existence, à être enterrée vivante. C’est que Créon ne peut se permettre de ne pas faire respecter la loi face à son peuple. Au moment de fermer le tombeau, Créon apprend que Hémon, son fils et fiancé d’Antigone, s’est laissé enfermer. Quand il revient sur ses pas, la jeune fille s’est pendue et Hémon se tue avec son épée. Eurydice, accablée de désespoir à l’annonce de la perte de son fils, s’ôte la vie en se tranchant la gorge. Tout va très bien chez les Labdacides …. Créon se retrouve seul accablé par le poids d’une culpabilité indicible et la destruction de sa famille.

Antigone est la jeune fille qui s’oppose au pouvoir royal pour rendre hommage à son frère défunt et lui éviter d’errer à jamais dans les limbes. C’est l’histoire d’une révolte et de l’acceptation d’un destin tragique, c’est l’histoire du conflit entre la morale et l’ordre, nœud de la pièce d’Anouilh. Antigone semble faible, frêle et même puérile dans ses craintes livrées à sa nourrice, dans l’utilisation de la petite pelle qu’elle utilisait, enfant, à la plage. Cependant, malgré ses aspirations de mère puissante et protectrice, elle ne fait pas partie du monde des grands. Elle est butée et parfois colérique. La jeune fille, adolescente, rejette le bien commun, rejette la loi sociale parce qu’elle est la loi des adultes et qu’elle ne s’y pliera pas. Est-ce par orgueil, par l’accomplissement d’un devoir envers elle-même ? Elle affirme à plusieurs reprises être la fille d’Oedipe, du grand Oedipe. En même temps, elle recherche le bonheur, elle a un goût sensuel pour le matin, tôt, à l’heure où elle y est seule, où le jardin « ne pense pas encore aux hommes », un jardin d’Eden d’avant le chaos. Elle aimerait avoir le temps de vivre pleinement mais…. sa force de caractère fera qu’elle devra accomplir sa destinée en refusant une vie médiocre, sans sursaut, pour préférer la mort dans la lumière de la révolte, du NON. Antigone, c’est l’intransigeance de la jeunesse, d’une nature passionnée et idéaliste. Une jeune fille entière empêtrée dans ses multiples contradictions entre actions et convictions qui l’amèneront à assumer les conséquences tragiques de son refus du compromis. Elle se révolte contre les attitudes des êtres humains et est, aussi, la jeune amoureuse d’Hémon qui exprime ses désillusions auprès du garde et se montre, ainsi, plus humaine et d’autant plus tragique quand elle fait émerger la dimension psychologique de la version moderne du mythe : celle de l’erreur sur soi-même.

La relecture de l’Antigone d’Anouilh m’a laissée un long moment sans pouvoir exprimer ce qui m’a de nouveau bouleversée par le texte, dépouillé, incisif et douloureux de la pièce moderne. La dimension tragique est encore plus intense que le texte de Sophocle car j’ai eu la sensation qu’Anouilh mettait les mots sur ce qui fait mal. Le texte m’a submergée d’émotions, toujours aussi fort qu’il y a presque quarante ans. Antigone est toujours celle qui, quelque part sommeille toujours au fond de soi, prête à se réveiller, tonitruante, juste avant que la sage Ismène ne la fasse taire pour sauvegarder le compromis qu’elle est incapable de faire. Cependant, il est nécessaire de ne pas museler l’Antigone qui se cache , elle est essentielle pour s’éveiller et lutter contre l’injustice et la médiocrité.

Quelques avis :

Babelio

Lu dans le cadre

#Un mois au Japon·Littérature japonaise·Manga

Le chat qui rendait l’homme heureux -et inversement- T3 &4

Je continue la lecture de la série « Le chat qui rendait l’homme heureux et inversement » avec les tomes 3 et 4. Kanda et Fukumaru ont appris à s’aimer et à vivre ensemble. Le chat est très attaché à son maître et le lui montre chaque jour avec ardeur. L’autrice Umi Sakurai, après avoir développé dans les précédents opus les blessures psychologiques du dodu félin, relate celles de l’homme, Kanda.

L’épouse de Kanda lui manque énormément et peu à peu Fukumaru comble l’espace vacant au point que ses bêtises, toujours aussi mignonnes, ouvrent à Kanda les portes de la résilience, lui qui ne supporte plus les salles de concert et les concerts tout court. Lui qui ne peut plus vivre de sa passion, grâce à son chat, rencontre – ah la magie de la marionnettiste ! – d’autres personnes, des hommes qui l’admirent comme un jeune collègue, bouillant d’un enthousiasme exubérant, puis un pianiste réputé. Ce dernier est croisé dans la fameuse animalerie où Kanda a acheté Fukumaru. Le pianiste a récupéré le chat, une femelle, de sa mère qui s’en est très vite lassée. Décidé à confier l’animal à un refuge, il se rend compte que cela lui est impossible : des souvenirs d’enfance remontent à la surface lui montrant l’évidente inconséquence maternelle, prendre les animaux pour de simples jouets que l’on peut mettre au rebut. C’est dit, la petite chatte restera à ses côtés et pour ce faire, il lui faut le matériel adéquat. C’est à l’animalerie que la rencontre entre Kanda, le pianiste tant admiré, et Hibino, fan de Kanda et désireux de le surpasser, a lieu.

L’autrice utilise à fond les ficelles de la marionnettiste qu’elle est pour lier les passés de Kanda et de Fukumaru car le lecteur est amené à voir les souvenirs communs de la chatte adoptée et ceux de Fuku. Les scènes sont toujours aussi mignonnes et douces sans être lassantes.

Le tome suivant renforce les liens entre les deux artistes au point que la vérité se fait jour : leurs chats respectifs sont issues de la même portée. Hibino recueille les conseils de Kanda, notamment pour appeler sa chatte qui se terre, effrayée à l’idée d’être abandonnée. Elle doit avoir un nom, pour le connaître, Hibino surmonte sa colère à l’encontre de sa mère pour le lui demander. Marine, la chatte s’appelle Marine. De fil en aiguille, Kanda se propose d’aider Hibino à gérer sa nouvelle vie de propriétaire de chat. Mission numéro 1 : gagner la confiance de Marine, ce qui se fait rapidement, Marine est aussi traumatisée par la peur de l’abandon que Fuku. Mission suivante : mise en place la caisse à litière, en mettre ni trop ni trop peu, c’est tout un art. Kanda invite Hibino chez lui pour présenter Fuku à Marine. Et là, les retrouvailles sont adorables.

Kanda s’ouvre aux autres et renoue, tout simplement, avec la vie au point qu’il accepte d’assister au concert donné par le groupe d’un de ses élèves. On voit Kanda s’inquiéter, cauchemarder, on se demande s’il ira jusqu’au bout malgré son angoisse profonde. Son ami d’enfance décide de faire un test et de l’emmener à un concert avant de se rendre à l’invitation de son élève. On comprend alors la raison de sa phobie lorsqu’il replonge dans ses tristes souvenirs. Là, encore, l’amitié permet d’accéder à la résilience tout comme la présence du chat apaise et panse les blessures.

Peu à peu les choses sont dites, les peurs comme les envies. Hibino parvient à surmonter sa jalousie et Kanda sa peur des salles de concert. Les émotions des héros humains sont accompagnées des émotions félines que l’autrice croque avec humour, drôlerie et beaucoup de tendresse.

Traduit du japonais par Sophie Piauger

Quelques avis

Babelio T3 Babelio T4

Lu dans le cadre

Les bulles de la semaine sont à découvrir et à lire chez Noukette.

La bibli des p'tits chats (ados)·Littérature française·Science Fiction

Astro N/F tome 1

La Terre, 2165, est confrontée à un tel effondrement de la fertilité que l’espèce humaine est menacée d’extinction, que les sociétés s’écroulent ouvrant les portes à la barbarie. Un important consortium a construit des arches pour tenter de sauver ce qui peut l’être. Le vaisseau intergalactique « L’Avenir » est lancé à travers la galaxie afin de trouver une nouvelle planète à coloniser et ainsi offrir un autre futur aux humains. La société est divisée en deux : les Fertiles, peu nombreux et joyaux à protéger, les Non-féconds devenus des rebuts, des loosers, des gens à éviter.

Depuis des mois, l’Avenir parcourt la galaxie, s’arrêtant sur quelques planètes-étapes pour refaire ses réserves d’eau et de nourriture. A son bord, des serres, des champs, des animaux d’utilité et d’autres appartenant à la faune sauvage, des tableaux de Maîtres, du mobilier historique, un général autoritaire, des castes privilégiées, des petites mains stériles formées à donner leur vie pour la survie des Fertiles … et une famille, celle de Daphné Niels, jeune mécano et unique N parmi les siens. Daphné, dont la vie s’est arrêtée quand elle a appris qu’elle était stérile, sera le grain de sable qui en rencontrera un autre rouage récalcitrant, Alexander Perkins, fils du général propriétaire de l’Avenir.

Dans un espace confiné en plein cœur de l’espace interstellaire, une société humaine réduite à une cohabitation forcée et à un système de castes, ne peut générer qu’un sentiment d’injustice et un terreau pour la révolte. Alors que Daphné se désespère, en sombrant dans un alcoolisme pseudo-consolateur, de ne pouvoir procréer et de donner un sens à sa vie, d’autres, des F, refusant leur statut de reproducteurs et les injonctions assenées, et des N ne supportant plus d’être « le terrain d’entraînement des F » fomentent un coup d’état. Aboutira-t-il ? Renversera-t-il réellement l’ordre établi et les idées préconçues ? Toujours est-il qu’il y aura des trahisons, de l’amitié forte, de l’amour intense, des liens familiaux étroits et solides, des violences et de la douceur, du sombre et de l’espoir de trouver un remède à l’infertilité.

Violaine Janeau avec « Astro N/F » offre un space-opéra très prometteur avec ce premier tome. Tous les ingrédients du genre sont présents graduant l’intensité dramatique du récit. Les personnages sont attachants, ils sont bien incarnés dans leur rôle et leur caractère : on les plaint, on les déteste ou on les aime, on a envie qu’ils s’en sortent et qu’ils accèdent aux joies espérées. Le parti pris d’un récit en italique au passé simple et d’un autre au présent m’a, au début, un peu désarçonnée. Puis, rapidement l’écho des deux récits a pris corps et montré une cohérence dans le sens que l’un comble les blancs de l’autre. Le passé proche éclaire le présent et donne aux les personnages une épaisseur intéressante.

« Astro N/F » est un roman prenant qu’on ne lâche pas. Il permet également d’interroger notre modernité et ses regards sur la maternité, la parentalité. Aujourd’hui, les enfants sont des enfants choisis et attendus que l’on choie. Cependant, force est de constater qu’il y a aussi, au sein de notre société moderne, des couples qui font le choix de ne pas avoir d’enfant. L’injonction d’un couple doit-elle être celle de la procréation ? Peut-on être des femmes et des hommes accomplis sans procréer ? Si la situation démographique d’  « Astro N/F » était nôtre, comment réagirions-nous ? L’instinct de survie peut-il bouleverser les fondements d’une société ? Autoriserait-il la disposition des corps féconds au bon vouloir d’une dictature ?

J’ai trouvé intéressant le parti pris de l’autrice abordant avec originalité la narration d’un long voyage interstellaire en prenant comme point d’achoppement au récit le problème de la fertilité.

Merci à #NetGalley et aux éditions Explora pour cette agréable découverte.

Quelques avis:

Babelio Sharon Dévoreuse de livres

Badge Lecteur professionnel
#Un mois au Japon·LaBD de la semaine·Littérature française

Shamisen

Ce conte est inspiré de la, vraie, vie de la goze Haru Kobayashi, grande joueuse de shamisen.

Par une nuit d’hiver, glaciale et venteuse, une jeune femme dépose son bébé, aveugle, à la porte d’une maison. Un vieil homme, joueur de shamisen, instrument traditionnel japonais, y vit et recueille le nourrisson. Il décide de l’appeler Haru.

Le roman graphique relate le parcours d’Haru, joueuse de shamisen aveugle, goze ou musicienne, artiste itinérante allant de village en village, dans tout le Japon, pour égayer les paysans et les marchands. Après avoir ému au plus profond d’eux-mêmes, les habitants d’un village où elle s’est produite, par sa musique et son chant, Haru continue sa route et pénètre dans une forêt. Elle rencontre le kappa, une créature qui a enlevé des enfants du village. Il se plaint et se lamente à Haru de ne provoquer que répulsion et haine. Elle, elle ne le fuit pas, n’est pas dégoûtée par son aspect …. elle est aveugle, certes, mais est sensible aux émotions d’autrui, aux moindres bruits qu’elle perçoit, aussi saisit-elle la colère, la souffrance que le kappa a en lui en raison du rejet qu’il subit. Haru lui offre un récital qui transporte, par sa beauté, la créature au point d’en être transformée, au point de rendre les enfants à leurs parents et de s’excuser de ses nombreux méfaits. La musique délicate a touché en plein cœur celui qui souffrait de colère et de haine. Comme le récital lui ouvre une nouvelle voie dans sa vie, que ce moment de grâce passé avec Haru symbolise la fin de ses mauvaises attitudes, le kappa souhaite la remercier en lui offrant une clef, celle de la dimension divine. Haru reprend son chemin, son itinérance, et rencontrera les protagonistes du folklore japonais. Une en particulier, la fera souffrir mille morts en exigeant un récital alors qu’il fait un froid glacial, que ses doigts gelés et sa gorge nouée ne peuvent produire aucun son. Haru refuse d’accéder à la demande de la Sorcière des neiges qui transforme tout ce qui l’entoure en statues de glace. Jusqu’à ce que …. je n’en dirai pas plus.

« Shamisen » offre une immersion dans le folklore japonais, encore méconnu en Occident malgré le franchissement des frontières de la culture japonaise. Les scénaristes Tiago Minamisawa et Guilherme Petreca, qui signe aussi les illustrations, proposent une promenade onirique aux côtés d’Haru au cours de laquelle sont abordés en profondeur les thèmes de la beauté et de la liberté de l’art. Ils permettent de découvrir les yokaï, divinités japonaises qui accompagnent ou perturbent le cheminement d’Haru, un peu à la manière des korrigans dans les contes traditionnels bretons.

Les dessins sont minutieux et s’inspirent à la perfection de l’art pictural nippon, notamment celui des ukiyo-e, peintures sur bois. Les planches peuvent rappeler des tableaux ; elles sont magnifiques et invitent à la contemplation, au questionnement philosophique et à la méditation.

Le plus du roman graphique est la transcription en japonais et en français des textes chantés par Haru et le chapitre final des références et inspirations qui apportent de nombreuses informations historiques et culturelles pour enrichir la lecture et titiller la curiosité intellectuelle pour ouvrir d’autres portes littéraires ou artistiques. Sans oublier la possibilité de scanner le QR Code afin de s’immerger encore plus dans la culture nipponne.

« Shamisen » se lit et se relit, émerveille et ne lasse à aucun moment. J’ai aimé me perdre dans les dessins et leurs détails. Un moment de pur bonheur de lecture.

Quelques avis:

Babelio Journal du Japon

Lu dans le cadre

Les bulles de la semaine sont à découvrir et lire chez Mokamilla.

Fantastique Fantasy·Littérature française

La quinte geste

J’ai reçu ce roman dans le cadre d’une opération « Masse Critique : le mauvais genre ». Il m’avait intriguée tant par son titre, intriguant, que par sa couverture, peu commune et j’ai eu l’heur de le recevoir.

La geste est « un ensemble de poèmes en vers du Moyen-Âge, narrant les hauts faits de héros ou de personnages illustres », Estelle Tolliac n’use pas de vers mais d’une très belle narration en prose reprenant les codes de l’épopée en une geste chorale qui mêlera le destin de cinq personnages et relatera leurs hauts faits. Quel est le lien entre une princesse, ultime espoir d’un peuple disparu, une fugitive à la blanche chevelure poursuivie, sans pitié, par des hordes de soldats aveugles, un trouvère misanthrope, une étrange Altesse « miroir », une héritière décidée à conserver ce qui revient à sa lignée et une future reine asservie aux lois patriarcales? C’est ce que relate l’autrice dans un formidable roman qu’on ne lâche pas une fois commencé.

« La quinte geste » se déroule en cinq temps, cinq histoires, dans un monde médiéval imaginaire, qui se rejoignent autour d’Aigle, un jeune trouvère des îles Salines. Son histoire croise sans cesse quatre autres pour amener les uns et les autres à combattre le peuple des Antharites dont les guerriers aveugles ravagent le Continent par leurs raids sauvages et incessants. Lorsqu’il rencontre Ysèle, lors d’un séjour en prison, il s’aperçoit que les Antharites entreprennent une campagne de conquête du monde et qu’ils recherchent une femme et un bébé. Le mystère s’épaissit d’autant plus que l’autrice interrompt le récit pour en commencer un autre qui apportera de quoi combler les blancs du précédent. Chaque geste répond aux autres en un chant choral de manière magistrale. Chaque geste m’a transportée dans un univers particulier qui m’a aidée à comprendre l’ensemble du roman. La force d’évocation de l’écriture d’Estelle Tolliac est d’une grande beauté, tout y est juste, mesuré avec brio pour que l’intensité dramatique soit amenée au bon moment.

L’univers créé par l’autrice invite également à s’attacher aux personnages et à s’interroger sur ce qui fait notre humanité, ses aspects sombres comme ses côtés lumineux. Le désir irrépressible de domination de l’autre, et ce jusqu’à l’annihilation, d’un peuple sur les autres, la sauvagerie exercée sur la nature comme sur les êtres humains. Ou encore, l’interrogation sur le genre : être femme est-ce être esclave du patriarcat le plus dur ? Peut-on être à la fois homme et femme ? Ysèle, l’Altesse philite, devient un élément de réponse …. et si ce n’était qu’une question de point de vue ou de l’image que l’on souhaite renvoyer à l’autre ? « La quinte geste » renvoie aussi à la question de l’individualisme, forcément égoïste, que ressent souvent Aigle, face à la noblesse des sentiments dont il fera, aussi, preuve au moment où on s’y attendra le moins. Quoique Aigle est tout sauf un personnage froid et insensible, il a érigé des défenses autour de lui pour ne pas sombrer dans le désespoir.

« La quinte geste » est un roman rythmé, avec des coups de théâtre, des rebondissements inattendus, des voies improbables, des moments d’intense émotion, de la dramaturgie, des points d’orgue et une quête primordiale qui relancent le récit.

Je ne connaissais pas du tout l’autrice Estelle Tolliac, je n’avais jamais rien lu d’elle et j’ai été captivée par sa plume incisive et d’une grande richesse. Son style est agréable, elle sait trouver les mots justes, les descriptions qui permettront une immersion dans son univers. Il n’y a rien à enlever ou à ajouter, c’est umami : toutes les saveurs de l’épopée héroïque sont présentes pour parvenir à ce sentiment de plénitude.

Une très belle découverte offerte par Masse Critique de Babelio et les éditions Forgotten DREAMS, découverte donnant envie de lire les précédents romans de l’autrice.

Quelques avis :

Babelio

tous les livres sur Babelio.com
#Un mois au Japon·Littérature japonaise·Poésie

Le troisième jeudi, c’est poésie #8

Pour ce rendez-vous mensuel, je vous emmène au Japon car chaque mois d’avril je dépose ma valise immobile au Pays du Soleil levant. Il y a 3 ans, j’ai acheté un recueil de haïkus sur le thème « Instants du quotidien ». Je vous en offre quelques uns aujourd’hui.

Les couleurs de l’arc-en-ciel
dans la mousse du shampooing –
Le printemps commence.

Chizuko Tokuda (poétesse contemporaine)

La pointe de l’aiguille

cassée

des cailles carcaillent

Les volubilis

enserrent le seau du puits

je demande à mon voisin de l’eau

Chiyo-Ni (nonne bouddhiste et poétesse japonaise de la période Edo.)

Etoiles d’été –

je pense à une lettre

que je voudrais donner à ma fille

Minako Tsuji (poétesse née en 1965)

Sous mon balai

rampant hors des débris

une abeille d’hiver!

Madoka Mayuzumi (poétesse née en 1962)

Dans le cadre

LaBD de la semaine·Non fction/ Essai·Roman graphique/BD

La petite bédéthèque des savoirs, T22: le libéralisme

Cette semaine est consacrée aux bulles documentaires et, bien ennuyée par le thème, je suis allée demander conseil auprès des bibliothécaires de la médiathèque. Elles m’ont présenté le seul tome, sur les étagères, de la « Petite bédéthèque des savoirs » aux éditions du Lombard : « Le libéralisme » écrit par Pierre Zaoui, professeur de philosophie, et mis en images et couleurs par Romain Dutrex.

L’objet en lui-même est très agréable, la couverture est géniale et donne envie d’ouvrir l’ouvrage. Je me suis donc lancée.

Vous saurez tout sur le libéralisme en lisant cet opus, érudit mais pas trop, vulgarisant avec efficacité les notions contenues dans le libéralisme. Les illustrations, très drôles et colorées, sont au service du texte, parfois ardu, et permettent au béotien de ne pas fermer le l’album.

D’emblée, j’ai été confrontée à la polysémie du mot « libéralisme », tellement polysémique qu’il en devient abstrait et un véritable fourre-tout. J’ai suivi, tant bien que mal, les premières théories du XVIIIè siècle, accompagnée par les mânes de David Hume et de Montesquieu. Ces derniers ont aussi bien du mal à comprendre les multiples nuances du libéralisme : entre le début de l’industrialisation, en passant par la Révolution russe, le programme économique du Parti communiste chinois, François Fillon, Emanuel Macron et les migrants du XXIè siècle en quête de libertés, il y a de multiples déclinaisons aussi contradictoires qu’antagonistes. Nos deux fantômes en goguette cherchent à comprendre comment le monde en est arrivé là. Ils en lisent des livres au point qu’ils squattent une librairie des heures durant ! Ils se désespèrent en constatant que le libéralisme qu’ils avaient imaginé est devenu tellement protéiforme qu’on ne peut le résumer en quelques mots.

Au commencement, tout allait bien : le libéralisme était un moyen pour obtenir une paix perpétuelle grâce aux libertés et aux échanges tant économiques que culturels. Rapidement, le libéralisme part dans toutes les directions, oubliant par-ci une once d’humanisme, ajoutant par-là une dose d’égoïsme. Pourtant de loin, « les libéraux sont tous différents, des esprits libres et des individus singuliers » …. de loin seulement car il suffit d’ôter les masques pour que derrière s’affiche le même désir du profit, un profit pas vraiment pour le bien commun. Alors quand l’idée, très belle au départ, du libéralisme a-t-elle dérapé ? Sans doute lorsque le libéralisme est devenu un concept-monde où tout est tellement imbriqué que son côté émancipateur se transforme en système aliénant.

Nos deux revenants s’interrogent « Où ça a merdé ? » et Montesquieu de lire à haute voix un passage édifiant « Autrement dit, la finalité des premiers libéraux – la paix – les a conduit à promouvoir un système aussi efficace que dangereux car risquant à chaque instant de rendre à nouveau la guerre désirable, y compris sous des formes encore pires que celles qu’ils avaient jusque là connues… » Quand ils terminent de compulser les ouvrages sur les guerres mondiales, ils sont consternés et se disent que les hommes sont loin d’être matures pour mettre en place un vrai libéralisme.

Bon, alors, c’est quoi le libéralisme, en vrai ? Issu d’un désir de justice nouvelle et d’une nouvelle soif de l’or. Né d’un désir d’ordre et de révolution, de libération que de soumission des masses au travail, d’un désir de paix et de solidarité avec en corollaire celui de la lutte incessante pour dominer l’autre. D’un côté des idéaux honorables, de l’autre des pulsions horribles et mortifères. De quoi avoir mal au crâne à force de vouloir rendre clair ce qui paraît plus que flou.

Le libéralisme, c’est comme à la Foirfouille, on trouve de tout.

« Le libéralisme » est un opus dans lequel les auteurs font la part belle à l’humour ce qui permet de ne pas perdre le lecteur. L’introduction de Pierre Zaoui donne des bases pour comprendre le discours tenu dans le documentaire. Le glossaire est très bien ciblé et est accompagné par un index des théoriciens, des économistes, des philosophes cités dans l’ouvrage.

Une bédé documentaire intelligente que j’ai pris plaisir à lire.

Quelques avis:

Babelio

Quelques images:

Lu dans le cadre

D’autres bulles à découvrir et à lire chez Fanny.

#Un mois au Japon·Chat m'plaît·chatperlipopette's chat-lon·La cuisine de Chatperlipopette

Tempura de légumes

(crédit photo: internet)

L’an dernier, alors que je savourais la lecture de « Un sandwich à Ginza » de Yôko Hiramatsu, je salivais en lisant ses descriptions de tempura dégustés dans les restaurants et autres gargotes forts sympathiques de Tokyo ou d’ailleurs au Japon. Je reportais sans cesse mes essais de tempura et à force de procrastination j’ai laissé passer une année. Avril 2024 sera le mois du tempura.

La pâte à « beignets japonais »

125g de farine tamisée

50g de fécule de pdt/maïs/crème de riz

250g à 300g d’eau très froide

1 CS de substitut végétal d’oeuf entier

1/2 sachet de levure chimique

1 pincée de sel

La recette

Mélanger les ingrédients de la pâte à tempura jusqu’à l’obtention d’une pâte lisse. Mettre au réfrigérateur au moins 30′.

Pendant ce temps, préparer les légumes que vous souhaitez déguster en tempura. J’ai choisi de la courgette, des shitakés, de la courge bleue de Hongrie et de l’oignon.

Les détailler en tranches fines.

Mettre l’huile à chauffer dans le wok et quand la température est idéale, tremper les tranches de légume dans la pâte et la mettre, du bout du couteau, à frire quelques minutes.

Savourer chaud avec du riz à sushis aux algues.

Pour une première ce fut une réussite (bien que la photographie ne rende pas justice au plat). J’ai ajouté du tofu nature que j’ai fait en tempura également, histoire d’avoir un peu de protéines. La recette du riz aux algues est celle du riz pour sushis auquel, une fois cuit et tiédi, j’ai ajouté quelques pincées de laitues de mer et de morceaux de wakamé.

Dans le cadre